Un bol en plastique de vingt centilitres couvert d’un opercule en aluminium. Trois plats au choix : couscous, hachis parmentier, macaroni-fromage. Mettre de l’eau à bouillir, soulever l’opercule de deux centimètres, verser l’eau jusqu’au trait, refermer, attendre
Dehors la pluie transforme en boue le cône de terre du chantier de l’école
Le plat déshydraté met quatre minutes à se reconstituer
(attention à ne pas te brûler les doigts)
La fenêtre ferme mal, la condensation ruisselle sur la vitre
Ce hachis est une soupe épaisse
La télé des voisins – les cours de la bourse, le bonjour de Mourousi
Du bol fumant monte l’âcre des oignons et l’acide de la tomate. Le goût est celui – corps sans esprit – de l’industriel avec, très prononcé, le piquant du céleri. Le hachis est peut-être le meilleur des trois. Avalé en cinq bouchées il remplit le ventre jusqu’au soir
Les ouvriers se réchauffent en cercle autour d’un brasero
Une tranche de mimolette sur une triscotte, un yaourt nature
ces tourbillons de rouge que dessine la confiture de fraise
puis un mazagran de café du matin réchauffé au gaz
(retire la casserole du feu aux premiers frémissements)
Dans le JVC 30-60 posé sur le frigo une chanson enregistrée sur cassette
Le rugueux du mazagran au creux de la main
Les voix ondulent sur la bande froissée
La céramique texturée forme des cratères de lune que les doigts parcourent en se brûlant
« Une argile au creux de mes mains »
Repas nourri d’indifférence et pressé par le temps, entre deux cigarettes mal éteintes
(jette la poubelle en sortant)